Le secteur de l’assurance au cœur des mutations métiers

Cet article se focalise sur la carté d'identité RH de l'assurance, ces enjeux spécifiques et la manière dont les principaux métiers évoluent en volume. Comment anticiper les prochaines évolutions ?
Le secteur de l’assurance au cœur des mutations métiers
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La publication du rapport ROMA 2024, début novembre, offre un aperçu précieux de l’évolution des métiers dans l’assurance. En le confrontant aux enseignements du rapport 2023, il devient possible de mesurer les mouvements de population métier et d’évaluer leur adéquation face aux défis majeurs du secteur : digitalisation, montée des nouveaux risques, et attractivité des talents.

Avec 10 000 emplois créés en dix ans, le secteur continue de croître, mais les mutations rapides des priorités stratégiques, comme l’adaptation aux technologies ou la réponse aux nouvelles attentes des clients, nécessitent une allocation plus fine des ressources (GPEC). Cet article explore comment ces évolutions se traduisent au sein des populations métiers, en s’appuyant sur les chiffres clés et les tendances dégagées par les rapports de France assureurs.

Note de synthèse RH du secteur de l'assurance

  • Quels sont les chiffres clés des métiers de l’assurance ? Dans l’assurance, 92,8 % des collaborateurs sont en CDI, et 52,9 % sont cadres. Le secteur se distingue par une forte culture de formation professionnelle continue, avec un taux d'accès de 90,6 % en 2023. L’attraction des talents passe aussi par les alternants, qui représentent 23,5 % des recrutements. Toutefois, l’âge moyen de 42,5 ans souligne un enjeu générationnel, avec près d’un salarié sur cinq ayant plus de 55 ans.
  • Quelles sont les principales tendances de mouvements de populations dans l’assurance ? Les métiers d’indemnisation (+2,1 %) et des systèmes d’information (+3,2 %) sont en croissance, tandis que la relation clients (-4,8 %) et la gestion des actifs (-3,8 %) enregistrent des baisses de leurs effectifs.
  • Quels sont les défis RH auxquels les équipes doivent faire face ? Les RH accompagnent les transformations technologiques, soutiennent les reconversions professionnelles et renforcent l’engagement des collaborateurs dans un contexte de diversité générationnelle et d’évolutions organisationnelles.

Carte d’identité RH du secteur de l’assurance

Le secteur de l’assurance en France regroupe 157 100 employés en juin 2023, avec une majorité de cadres et un fort ancrage dans les CDI. Cependant, il fait face à des défis démographiques et des évolutions significatives dans la répartition des métiers.

Effectifs globaux

  • 157 100 employés à juin 2023, dont 145 790 en CDI (92,8 %).
  • Croissance de 5 % des effectifs sur les 10 dernières années.
  • Plus de 10 000 emplois créés sur la dernière décennie.

Caractéristiques démographiques

  • 52,9 % de cadres, contre 19 % pour l’ensemble de la population active française.
  • Âge moyen : 42,5 ans.
  • Augmentation des collaborateurs de +55 ans, passant de 24 660 à 27 830 en 10 ans, représentant 18 % de la population totale.

Recrutement et alternance

  • 23,5 % des recrutements sont des alternants, qui représentent désormais 4,6 % des effectifs.
  • 61 % des embauches en CDI.

Turnover et mobilité

  • 12,3 % de turnover en 2023, en hausse de près de 4 points sur 10 ans.
  • 30 % des cadres de moins de 35 ans expriment un souhait de mobilité interne.

Répartition des effectifs par métiers

L’OPCO Atlas et France assureurs distinguent 2 types de population, les collaborateurs au sein de “métiers cœur” de l’assurance, et les métiers “support” , voici leur ventilation : 

  • Métier ""cœur" : 106 100 collaborateurs (67,5 % des effectifs)
    • Distribution et développement commercial : 57 000
    • Indemnisation et accompagnement : 28 000
    • Relation clients et opérations d’assurance : 13 000
    • Conception et adaptation de l’offre : 6 000
    • Gestion des actifs : 2 000
  • Métiers support : 51 000 collaborateurs (33,5 % des effectifs)
    • Systèmes d’information et transformation digitale : 15 000
    • Pilotage économique, comptable et financier : 8 000
    • Environnement de travail et appui aux équipes : 7 000
    • Projets d’organisation et de transformation : 6 000
    • Gestion et maîtrise des risques : 3 000
    • Ressources humaines : 3 900
    • Conseil juridique et secrétariat général : 2 000
    • Direction de l’entreprise - centres de profit : 1 800
    • Communication et multimédia : 1 700
Répartition des populations "coeur" et "support" au sein du secteur de l'assurance

Les 5 enjeux RH du secteur de l’assurance

1. Planification stratégique et gestion des talents

Le secteur de l’assurance offre une opportunité unique pour investir dans une planification stratégique des RH, en réponse aux multiples transformations en cours : digitalisation, adoption croissante de l’IA, nouvelles régulations, vieillissement des effectifs, et défis d’attractivité et de rétention.

Prenons l’exemple du pôle métiers “commercialisation”, qui regroupe la Distribution et développement commercial ainsi que la Relation clients et opérations d’assurance. Bien que 36 % des recrutements se concentrent sur les commerciaux, on observe un rééquilibrage progressif vers les métiers de la relation clients. Pourtant, ces derniers connaissent des fluctuations marquées : après une croissance de +900 collaborateurs entre 2022 et 2023, la population a diminué de 660 collaborateurs en 2024.

Ces variations, combinées à un turnover élevé chez les commerciaux (11 %), pèsent sur les efforts de recrutement et détournent les ressources RH d’autres fonctions critiques, comme la conception de produits ou la maîtrise des risques. Or, dans un contexte où les enjeux climatiques, technologiques (cybersécurité) et comportementaux redéfinissent les priorités du secteur, ces métiers apparaissent comme stratégiques.

Impacts RH :
L'alignement des compétences dans un secteur en transformation rapide, sous l'effet de l'IA et des mutations du marché, nécessite une gestion ciblée des recrutements et des mobilités internes. Avec un taux de rétention de 12,3 %, comparé à une moyenne nationale de 15 % (source INSEE), le secteur de l’assurance fait face à un enjeu stratégique : renforcer la fidélisation des talents tout en renouvelant ses ressources de manière proactive.

2. Gestion des redondances et optimisation de la productivité

La présence de doublons dans certaines fonctions administratives et supports, consécutive aux différents regroupements de sociétés du paysage assurantiel, constitue un défi pour le maintien de la productivité. Les entreprises doivent opérer des redéploiements vers des métiers à fort enjeu, tout en préservant le climat social.

Impacts RH :
Face à cet enjeu, les RH peuvent explorer des solutions telles que la promotion de la mobilité interne, la mise en place de programmes de formation pour soutenir les reconversions professionnelles, ou encore la négociation de départs volontaires, afin de concilier optimisation des effectifs et maintien d’un climat social positif.

3. Cohérence des systèmes d’information

Les regroupements successifs au sein du secteur rendent critique l’unification des systèmes d’information pour garantir l’efficacité opérationnelle et la fluidité des processus.

Impacts RH :
Les équipes RH forment les collaborateurs aux nouveaux outils numériques et veillent à leur adoption optimale à l’échelle de l’entreprise.

4. Gestion de la spécialisation et des projets transversaux

Dans un secteur où la spécialisation des métiers est essentielle, il devient crucial de préserver un équilibre entre expertise métier et capacité à travailler sur des projets transversaux.

Impacts RH :
Les RH encouragent le développement de compétences transversales, la collaboration interdisciplinaire et la création de passerelles entre spécialisations, favorisant une gestion de carrière fluide et évolutive. 

5. Maintien de la culture d’entreprise et de l’engagement

Chaque fusion ou acquisition constitue un défi culturel majeur. Les différences entre les cultures organisationnelles des entités fusionnées peuvent diluer les valeurs ou, au contraire, offrir l’opportunité d’en construire de nouvelles. Ces dynamiques sont amplifiées par une collaboration intergénérationnelle de plus en plus marquée, notamment avec l’intégration croissante des alternants dans les effectifs. Avec 7 360 alternants représentant désormais 4,7 % des effectifs totaux, un chiffre en constante progression, les entreprises d’assurance doivent composer avec jusqu’à quatre générations travaillant ensemble.

Impacts RH :
Harmoniser les cultures organisationnelles passe par la valorisation des valeurs communes et le renforcement de la collaboration intergénérationnelle. Une communication claire et une implication active des collaborateurs dans un projet partagé soutiennent l’engagement et minimisent les tensions.

Les 5 enjeux RH du secteur de l'assurance

Les Chiffres clés d’évolution des populations de l’assurance

Évolution comparée des populations métiers entre 2022-2023 et 2023-2024

A partir des chiffres de France assureurs de Novembre 2024, nous retraçons ci-dessous les mouvements comparés entre les périodes récentes, puis dessinons la vue d’ensemble des métiers dont la population augmente et celles dont les effectifs diminuent.

Métiers "cœurs" de l'assurance

Les populations des métiers « cœurs » montrent des tendances hétérogènes, certaines évoluant dans des directions opposées d'une année à l'autre.

  • Distribution et développement commercial : Après une baisse de 1,6 % en 2022-2023, cette population a rebondi de manière significative avec une hausse de 4,5 % en 2023-2024, traduisant une priorité stratégique accrue sur cette fonction.
  • Indemnisation et accompagnement : Seule population "cœur" à croître de façon régulière sur deux ans : +1,6 % en 2022-2023 et +2,1 % en 2023-2024, signalant des besoins stables dans la gestion des sinistres.
  • Relation clients et opérations d’assurance : Dynamique inversée avec une forte hausse de +7,2 % en 2022-2023 suivie d’une baisse de -4,8 % en 2023-2024, reflétant un ajustement des ressources.
  • Conception et adaptation de l’offre : Après une croissance remarquable de +10,4 % en 2022-2023, la progression ralentit à +0,8 % en 2023-2024, marquant une stabilisation des équipes.
  • Gestion des actifs : Variation marquée avec une hausse de +8 % en 2022-2023, suivie d’une contraction de -3,8 % en 2023-2024, illustrant une rationalisation des effectifs.

Métiers "supports" de l'assurance

Les métiers supports révèlent également des variations significatives, certaines populations affichant une stabilité, tandis que d’autres alternent entre croissance et réduction.

  • Systèmes d’information et transformation digitale : Une croissance continue avec +1,8 % en 2022-2023 et +3,2 % en 2023-2024, confirmant l’importance stratégique de la digitalisation.
  • Pilotage économique, comptable et financier : Croissance modérée de +2,3 % en 2022-2023 suivie d’une contraction de -3,1 % en 2023-2024, signalant une optimisation des ressources.
  • Conseil juridique et secrétariat général : Croissance régulière sur deux ans : +7,1 % en 2022-2023 et +3,5 % en 2023-2024, reflétant une montée des besoins réglementaires.
  • Ressources humaines : Une légère hausse de +2,3 % en 2022-2023 suivie d’une baisse de -2 % en 2023-2024, signalant une stabilisation après des ajustements.

Ces évolutions mettent en évidence des priorités stratégiques fluctuantes. Tandis que certaines fonctions critiques comme les systèmes d’information affichent une croissance soutenue, d’autres, comme la gestion des actifs ou le pilotage financier, connaissent des rationalisations ponctuelles.

Vue d’ensemble des évolutions des effectifs de l’assurance par métiers

Les métiers liés à la croissance commerciale, à la digitalisation, et aux besoins juridiques affichent des hausses notables, tandis que les métiers centrés sur des fonctions administratives ou des rôles opérationnels plus traditionnels, comme la relation clients ou le pilotage économique, enregistrent des baisses.

Métiers en croissance :

  • Direction de l'entreprise ou de centre de profit : +4,6 %
  • Distribution et développement commercial : +4,5 %
  • Conseil juridique et secrétariat général : +3,5 %
  • Systèmes d'information et transformation digitale : +3,2 %
  • Indemnisation et prestations d'accompagnement : +2 %
  • Projets d'organisation et de transformation : +1,1 %
  • Conception et adaptation de l'offre : +0,8 %

Métiers en diminution :

  • Relation clients et opérations d'assurance : -4,8 %
  • Pilotage économique, comptable et financier : -3,1 %
  • Environnement de travail et appui aux équipes : -2,2 %
  • Ressources humaines : -2 %
  • Gestion et maîtrise des risques : -0,6 %
  • Gestion des actifs : -3,8 %
  • Communication et conception multimédia : -4,3 %
Les évolutions des populations par métiers du secteur de l'assurance

Les mobilités internes dans le secteur de l’assurance

Les mobilités dans le secteur de l’assurance sont répertoriées selon qu’elles sont dites “internes” ou externes (départs). La mobilité moyenne représentait 12,7% de la population entre 2022 à 2023, elle a diminué pour s’établir à 9,8% entre 2023 et 2024 . 

Ces mobilités internes concernent, quant à elles, une majorité de cadres (71%) et essentiellement celle des - de 55 ans (85%).

Voici l’évolution comparée des domaines métiers qui bénéficient le plus de ces évolutions internes sont: 

Les évolutions des chiffres de la mobilité interne au sein du secteur de l'assurance

Perspectives : les impacts de l’IA sur les métiers de l’assurance.

L’intelligence artificielle (IA) se positionne aujourd’hui comme un catalyseur majeur de transformation dans le secteur de l’assurance, redéfinissant les rôles, les activités, et les compétences.

A l’instar de la Direction Financière et des 4 scénarios d’évolutions de ses métiers, les principaux rôles au sein de ce secteur seront soit : 

  • Menacés : Ces métiers impliquent des tâches standardisées, peu de personnalisations, ils sont soumis à des contraintes réglementaires strictes et ne doivent pas affronter des contextes variés.
  • Complétés par l’IA : ces métiers sont caractérisés par une forte personnalisation, une adaptation aux contextes changeants, un large éventail de compétences sont essentiels. L'IA peut ici améliorer l'efficacité en fournissant des informations basées sur des données riches.
  • Protégés : Ces emplois sont axés sur les compétences émotionnelles, l'empathie et les relations humaines, que l'IA ne peut pas reproduire.
  • Créés : L'IA crée de nouveaux emplois, tels que des ingénieurs en IA, des éthiciens de l'IA, des gestionnaires de données, pour évaluer, développer et orienter les technologies d'IA.

Ces hypothèses permettent de comprendre les zones prioritaires d’intervention pour les RH, tout en identifiant les activités où la collaboration humain-IA peut produire le plus de valeur ajoutée.

L’IA agit comme un levier de changement structurant pour les RH. L’enjeu n’est pas seulement d’automatiser, mais de construire une collaboration humain-machine efficace. Pour cela, les entreprises doivent :

  • Prioriser les compétences clés : Identifier les compétences résilientes et stables pour investir dans leur développement.
  • Accompagner les collaborateurs : Mettre en place des programmes de reskilling vers des compétences enrichies par l’IA, favorisant des transitions professionnelles fluides.
  • Repenser l’allocation des ressources : Alignement des efforts RH pour soutenir les métiers critiques et stratégiques.

En définitive, l’IA dans les RH ne se limite pas à redessiner les contours des métiers, mais agit comme un vecteur d’opportunité pour transformer les processus, renforcer les compétences, et assurer une meilleure résilience des organisations face aux défis du futur.